Olivier 7 Fév 2012 En vol...7 commentaires

Malgré les épisodes neigeux qui ont succédé à un hiver exceptionnellement doux, j’ai pu profiter de la disponibilité de Michel pour passer ma qualif « vol de nuit ».

A priori, cela semble relativement simple. Après tout, y’a qu’à décoller, jeter un oeil au paysage et naviguer comme d’habitude, non ? Forcément, la réalité est tout autre. Voici un résumé fort mal illustré (l’iPhone est un peu limite dans ces conditions de basse lumière, mais je vous ferai bientôt une belle série au 5d) mais qui vous donnera une petite idée de ce qu’on peut ressentir en volant dans le noir.

Un cockpit éclairé

Première difficulté, trouver la lumière ! Bon, en fait, c’est comme dans une voiture, il y a un plafonnier, sauf qu’on peut choisir entre une lumière blanche ou rouge. Cette dernière permet d’y voir suffisamment sans pour autant éblouir et empêcher la vision nocturne, qui met tout de même une vingtaine de minutes à s’établir ! Car si notre oeil est performant, nous ne sommes pas non plus des chats et il faut un temps d’adaptation… Ensuite, il faut tourner deux molettes, une pour les feux de navigation (oui, oui, comme en bateau) et l’autre pour l’éclairage du tableau de bord. Celui-ci est très faible, toujours dans l’optique de ne pas éblouir. N’empêche, l’ambiance à bord est feutrée, un peu mystérieuse… Nous n’avons même pas démarré et déjà, j’adore…

Des instruments éclairés, c'est joli, même sur le parking ! En vrai, l'ambiance est plus chaleureuse avec l'éclairage rouge qui ne se voit pas sur les photos...

Premier vol sur la mer

Au premier vol, Michel me fait partir en baie de Fréjus pour des évolutions au-dessus de la mer. Le but est de me rendre compte qu’on perd très vite les repères dans le noir. La côte dans le dos, il n’y a en face de moi que le noir le plus complet. Les instruments brillent faiblement dans la nuit et j’ai l’oeil rivé sur l’horizon artificiel. Mon instructeur me fait faire des virages à plat, en montée, en descente… Les sensations sont gommées, et si on ne se fie pas à l’instrument, impossible de dire si l’on monte ou si on descend ! Parfois, la sensation de virage apparaît alors qu’on se replace justement en vol horizontal. Plus dur, l’horizon artificiel demande une grande concentration, sur ces premiers vols en tout cas. J’ai tendance à sur-corriger pour la montée ou la descente, alors qu’un ou deux millimètres de variation sur l’instrument suffisent à modifier l’assiette de l’avion dans des proportions suffisantes. Après 45 minutes d’évolution, nous reprenons le chemin de Cannes.

Premier atterrissage

Revoir les lumière fait du bien au moral ! Mais alors que je me réjouis de voir la piste de nuit, je ne parviens pas à la localiser ! En effet, l’aéroport étant situé en milieu urbain, les lumières de la ville rendent celles de la piste tout à fait quelconque et donc presque invisibles. En gros, si on ne connait pas avec précision l’emplacement de la piste, on risque fort de ne jamais la voir ! Alignés en finale, l’oeil sur les Papi, le spectacle est sublime. Je m’applique, arrondis et… touche un peu brutalement. Bigre, le sol monte vite dans la lumière des phares ! Le roulage n’est pas aussi simple que de jour. Il faut bien suivre les lignes jaunes sur la piste car franchement, on n’y voit pas grand chose… Les balisages bleus sur les bords indiquent les taxiway. Retour au parking… Ouf ! C’était dur, mais beau. Vivement la suite !

Le phare fait ce qu'il peut, mais on n'y voit tout de même pas grand chose ! Ici, vous devinez la piste 35...

Première navigation

Nous profitons un autre jour d’une météo pas trop défavorable pour faire une navigation en campagne, obligatoire dans la formation. Les nuages sont suffisamment hauts, en tout cas à plus de 1500 pieds au-dessus de notre niveau de croisière, alors, c’est parti… Décollage piste 35, virage à droite, passage à 2500 pieds à la verticale de la piste et montée vers WD. De nuit, on survole les sommets de l’Estérel sans les voir, c’est impressionnant ! Nous montons à 5000 pieds. Nous avons toujours la vue du sol mais en toute objectivité, nous n’y voyons pas grand chose par rapport à un vol diurne ! Le recours sytématique aux instruments aide à voler proprement. Petit à petit, j’apprivoise les indications et les repères. Là où, de jour, un simple coup d’oeil suffit, la vue extérieure permettant de piloter naturellement, il faut ici se concentrer pendant tout le vol pour garder son cap, son altitude. Comme de bien entendu, le vol est assez turbulent, il y a un peu de vent, il ne faut pas relâcher son attention. Cela fait un excellent entraînement ! Je me plaît à m’imaginer en IFR en vol au-dessus de régions inconnues, comme à l’époque des pionniers… Mais moi j’ai un GPS au cas où et surtout, le chauffage dans la cabine !

On voit le sol et des lumières, mais de là à reconnaître une ville en particulier... Mieux vaut soigner sa navigation et savoir avec précision où l'on se trouve !

Tours de piste

Cette séance consacrée aux tours de piste sera agrémentée d’une difficulté supplémentaire. Les Papi ne fonctionnent pas ! La piste 35 étant bordée d’arbres et d’immeubles, il n’est pas question d’arriver trop bas en finale. Michel m’explique donc comment calculer la bonne hauteur par rapport à ma distance de la piste. Cette donnée est indiquée par un instrument, pas question de faire ça au pifomètre ! Distance lue sur le DME, on multiplie par 3 pour avoir la hauteur en pied permettant d’être sur le plan en finale… Ce qui nous donne par exemple 1500 pieds à 5 nautiques, 1000 pieds approchant 3 nautiques, 600 pieds à 2 nautiques et… ensuite plus de chichis, on se pose ! La piste paraît bien plus courte de nuit que de jour. On la voit grossir dans le pare-brise, noire, encadrée de balises lumineuses. Soudain, le phare perce l’obscurité et éclaire timidement le seuil peint en blanc. On devine le bitume, l’avion arrondit sa trajectoire, réduction des gaz… Les roues touchent, on roule… Nous répétons l’exercice plusieurs fois, je me régale.

Dernier virage pour la 35... Une fois aligné, on la voit assez bien. De loin, avec la ville tout autour, c'est une autre histoire !

Solo !

Michel me demande de le laisser à l’aérogare et de faire deux tours solo. Depuis le début des vols de nuit, il fait la nav’ et la radio, me laissant toute la concentration nécessaire pour le pilotage. Me voici seul à bord. La douce lumière rouge du cockpit se veut rassurante mais je suis presque aussi ému que lors de mon premier vol solo ! Radio, roulage, alignement, décollage. Je viens d’en faire plusieurs, il n’y a pas de raison que ça se passe mal… 75 kts, le Piper décolle, roues freinées, train rentré… Je monte 1000 pieds dans l’axe, virage à droite au niveau de la pénétrante… 1500 pieds, parallèle à la piste avec Cannes-Mandelieu à ma gauche. C’est beau, une ville, la nuit, disait Bohringer. Il avait bien raison mais bon, j’ai un avion à poser, la poésie viendra plus tard ! Le PA-28 avance face à la mer. Je m’éloigne, passe le Cap de l’Aiguille, bien matérialisé par une petite balise lumineuse rouge. Virage, réduction, roues freinées, train sorti, 3 vertes… Dernier virage, finale. J’applique ma règle de trois, sort les pleins volets, check finale : mixture plein riche, plein petit pas, paramètres ok, on poursuit… Je perce à nouveau le grand trou noir entre les balises, les irrégularités du bitume apparaissent… Arrondi, touché… C’est fait ! Gourmand, je ferai trois tours au lieu de deux avant la fermeture de l’aéroport, aussi concentré et avide de sensations nouvelles qu’un gamin sur un manège… Michel me rejoint, nous rangeons l’avion.

Les rues animées de Cannes défilent sous les ailes... Je suis seul à bord, il fait nuit, mais j'ai pas peur du noir ;-) C'est trop beau !

Qualifié

Bien entendu, je ne vous raconte pas tout ici… je vous passe les pannes simulées par le formateur, genre panne de train pile au moment où le contrôle me demande un atterrissage court pour ne pas gêner un IFR à l’arrivée, la panne électrique complète qui impose d’allumer une lampe frontale pour voir les instruments ou encore cette finale à Nice, histoire de jouer avec l’ILS… Au plaisir de re-voler avec un instructeur qui valide votre niveau de vol tout en redonnant quelques conseils bien utiles, s’ajoute celui de la maîtrise graduelle de l’outil. Le vol de nuit reste impressionnant mais moins mystérieux. Surtout, je me sert de plus en plus naturellement des instruments, ce qui me permet d’anticiper et d’avoir un vol bien plus précis dans ces conditions. Cela ne pourra que m’être bénéfique de manière globale, y compris de jour ! Mon carnet de vol s’enrichit d’une nouvelle mention, qualifié vol de nuit. Trop fier !

La grosse tâche blanche, c'est le stade, bien éclairé en plein pic de consommation à cause du froid. Mais bon, ça fait un repère idéal dans la vent arrière pour la 35 ;-)

Et la suite ?

Cette qualification vol de nuit n’est pas une qualification IFR et ne me servira pas à faire des vols Cannes – Paris de nuit, mettons tout de suite les choses au point ! En revanche, cette qualification permet de faire de beaux vols locaux, ce qui n’est déjà pas si mal. Mais surtout, cela permet de terminer un voyage sereinement si l’on est en retard et que la nuit tombe. En hiver, il peut faire nuit peu après 17 heures. Le stress de devoir arriver avant la nuit peut entraîner une focalisation sur l’objectif destination fortement préjudiciable à la sécurité du vol. A l’inverse, la qualif’ vol de nuit permet d’arriver à Cannes, jusqu’à la fermeture, à 20h, ce qui laisse une marge bien plus confortable ! Reste que tous les aéroports et aérodromes ne fonctionnent pas la nuit et qu’il faut en tenir compte en voyage. En attendant, j’espère bien faire profiter famille et amis de ces nouvelles sensations de vol. Alors, rendez-vous à Cannes avant la fin de l’hiver ?

Cannes, ses plages, ses lumières... Ok, la photo est floue, mais ça donne une idée, non ?

7 commentaires sur “Qualifié vol de nuit !”

    BarbaCédre
    février 8th, 2012 at 12:12

    bravo pour cette premiere qualification nocturne reussite avec ton panache habituel…tu as du bien prendre ton pied…la nuit, les sensations et le charme doivent etre tout autre…
    encore felicitation

    Iva
    février 8th, 2012 at 7:51

    Voilà pourquoi on ne te voit plus depuis qques jours…Bravo ! Et bien entendu partante pour un vol de nuit;-))

    claire héliot
    février 8th, 2012 at 8:10

    Brrr !!!
    Impressionnant, c’est un voyage vers l’inconnu !

    philou
    février 8th, 2012 at 8:20

    Moi je dis bravo mais un bravo pour tout la qualif mais aussi la narration qui prend aux tripes et nous tiens en haleine encore bravo à +

    de Vaulx
    février 8th, 2012 at 10:27

    BRAVO PAPA !!!!!!
    Tu es super fort !

    je t’aime

    Julie

    Gege et François
    février 8th, 2012 at 1:05

    On s’y croirait !
    Emotion et fierté bien partagées !

    Pier
    février 12th, 2012 at 2:38

    Bravo !
    Bien compris la nécessité de cette nouvelle capacité qui te donnera plus de marge pour gérer la durée de tes vols.
    Moins de stress, plus de plaisir…

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